mercredi 2 mars 2016

Tour d'Islande...18 - L'étrange histoire du voyant de pression d'huile...


Reykjahlid - Iles Féroé

Mercredi 12 -Vendredi 14 Août



Aujourd'hui je vais vous conter l’Étrange histoire du voyant de pression d'huile et du tableau de bord fantôme...

Un vrai conte de la crypte...

Mais commençons par le commencement.

Christelle et moi avons donc regagné la civilisation la veille, après moult péripéties plus ou moins rocambolesques - voir articles précédents. Quelques péripéties qui ont usé le corps et le mental, tout aussi fabuleuses qu'elles furent.

C'est donc avec les yeux globuleux et le cerveau spongieux que je vais me réveiller ce matin-là, et mon corps flasque aura beaucoup de mal à s'arracher du petit lit de ce dortoir où nous nous sommes entassés à six...alors qu'il n'y avait que quatre lits. Le genre de moment où je bénis d'être bionique et de pouvoir me débrancher pour regagner une bulle de confort qui parfois, seulement parfois, fait du bien. Cela me permet surtout de dormir partout sans subir les ronflements d'autrui. Et sans subir les miens aussi. Parce qu'il paraît qu'à ce niveau, j'envoie du lourd - n'est ce pas Mme MaPelle?

Bref, je vais avoir une flemme d'enfer...

Mais il va bien falloir se bouger. Déjà parce que je suis censé quitter la chambre à midi, et surtout parce qu'il me faut faire la vidange de ma moto afin de finir d'éliminer la flotte encore présente dans la mécanique.

Je vais donc tourner un moment pour trouver un garage. Le temps s'assombrit, il va devenir dégueulasse, et très bientôt les ennuis vont commencer.

Mais pas tout de suite...

J'arrive donc à trouver un garage, la vidange se fait, j'indique bien au mécano de mettre deux litres d'huile. Adjugé, vendu, c'est fait, tout se passe bien, et me voilà parti pour les deux cents derniers kilomètres de mon périple en Islande. Une formalité.

Enfin c'est ce que je croyais, car cela va être tout le contraire.

Au bout de quelques dizaines de kilomètres, voilà que mon voyant de pression d'huile s'allume. C'est rouge. Et le rouge sur les voyants alors que le moteur tourne, c'est le mal. Je commence à stresser. En effet, on m'a dit que l'huile c'était important pour une moto. Je ne sais pas trop pourquoi, mais il parait que ce n'est pas une légende urbaine.

Alors je m'arrête. Il flotte. Il fait froid. Ma moto est peut-être en train de mourir. C'est la fin du voyage. Le bonheur.



Je redémarre la moto, le voyant est éteint, youpi. Surement une fausse alerte. Tout comme ce tableau de bord qui se met à clignoter. C'est nouveau, ça vient de sortir, mais ça ne dure qu'un bref instant.

Comme je suis dans le déni complet, je repars.

Et le voyant se rallume.

Et je m'arrête à nouveau.



Et je laisse refroidir la moto.

Et je repars.

Et ça va continuer comme ça un bon moment.

Et ça commence à m'énerver un tantinet.



Je contrôle mon niveau d'huile une énième fois, quand d'un coup un idée me traverse le cerveau - ce qui peut être douloureux. Et si il y en avait trop, de l'huile? Car objectivement, en réfléchissant un peu - ce qui peut aussi être douloureux - mon niveau d'huile apparaît sensiblement au-dessus de ma jauge. Enfoiré de mécano viking, je lui avais pourtant bien dit "deux litres"!!

Alors je repars, doucement.

Puisque c'est la fin de mes aventures en Islande, je profite des deux arrêts suivant pour une fois encore repenser aux gens qui m'ont aidé.




Encore un énorme merci à vous tous!! Plus de 6 mois après mon retour, je n'en reviens toujours pas de cette vague de soutien...et c'est finalement cela qui fut le plus extraordinaire dans toute cette aventure Islandaise démarrée il y a maintenant presque un an...déjà!!
Merci également à Touratech, iCasque, L'Equipement.fr, Jean-Sam Communication, La Motardie, Le Journal Des Motards, Roadtrip Magazine, Gorando.com et tous les groupes Facebook qui m'ont soutenu en relayant mes aventures!

Cela va continuer ainsi jusqu'à tomber sur une auberge paumée le long de la route. Je sors mon PC, me prends un chocolat chaud qui me coûtera une rétine, et file sur internet pour essayer d'analyser la situation avec les plus mécanos de mes connaissances - Florent si tu me lis, encore merci pour l'assistance...
Quelques échanges plus tard, me voilà sur le parking à tenter de vider le trop plein d'huile. Seulement mon sabot gêne bien l'affaire et je n'ai pas d'huile en secours au cas où, suite à une fausse manipulation, mon réservoir venait à se vider plus que de raison. 

Alors j'y vais doucement, en mode "bordel, faut pas déconner avec tes deux mains gauches".

Quelques frayeurs plus tard, me voici avec vingt-cinq bons centilitres en moins. Ceci doit suffire.

Et repars donc...

Ho joie!!! Le voyant ne se rallume pa...bin non...

Certes j'ai fait un peu plus de chemin, mais le voilà qui revient me hanter, ce satané voyant. En parlant de trucs hantés, mon tableau de bord, lui, se la joue de plus en plus Casper le Fantôme, toutes indications disparaissant pendant plusieurs secondes, de plus en plus souvent.

Et il continue à pleuvoir...

Décidément, ceci est une belle journée de merde. Mais quand j'y repense, fatalement, c'est juste un grand sourire qui s'affiche sur ma tronche de cyborg! Quelle lutte! 

Je vais donc continuer comme ça pendant cent cinquante kilomètres, que je vais mettre plus de quatre heures à parcourir, sans compter l'arrêt dans l'auberge où j'ai bien croûter une heure et quelques.

C'est sur les coups de 21h, peut-être plus, que je vais arriver à un camping sans âme, coincé entre une grande route et quelques buildings. Il pleut toujours, je décharge le strict nécessaire, je me fais vite fait à manger. Demain matin je dois être debout avant 6h...Et puisque je dors débranché pour éviter d'abîmer mes oreilles bioniques, et plus particulièrement les câbles, je ne vais avoir pour seule alarme que le vibreur de mon petit téléphone portable à 10 euros habilement coincé dans mon caleçon afin d'être certain de ressentir les vibrations du réveil.

Oui, ceci est véridique.

Non, je n'ai pas honte.

Je ne m’étendrai pas là-dessus, ce sont les aléas de la vie d'un implanté...on entend, mais il reste des situations qui nous rappellent que l'on est sourd avant tout et qui peuvent nous pousser aux plus étranges extrémités.

La vie d'un handicapé peut-être parfois bien difficile...

*ahem*

Je m'égare...

La nuit se passe, je me réveille avant même que mon réveil ne vibre - quel dommage, le soleil est déjà levé et je m'en vais directement vider encore un peu d'huile.

Les affaires rangés, je serai le premier à quitter le camping...mais le dernier arrivé au Ferry, ou presque. Car ce maudit voyant est encore là!

Cela commence à devenir flippant...

Les vingt-cinq kilomètres qui me sépare encore du Ferry vont donc être parcouru par tranche de trois ou quatre kilomètres...en restant aussi bas que possible dans les tours, et en faisant refroidir la moto autant que possible.

La toute dernière photo de mon tracteur en Islande...
Ce sont les mêmes routes que j'ai parcouru 15 jours plus tôt quand j'ai débarqué sur l'île...me dirigeant alors sans le savoir vers une des plus folle aventure que j'ai pu vivre, et vers des péripéties que moi, poireau devant l'éternel, n'aurais jamais osé imaginer ! Autant vous dire que l'émotion fut au rendez-vous même si ce maudit voyant de pression d'huile à quelque peu gâché la fête...

Les tous derniers kilomètres se feront d'ailleurs en roue libre...histoire d'être sûr de ne pas serrer le moteur avant d'arriver au ferry. En effet, à ce moment là, je suis plutôt optimiste sur le fait de trouver un garage une fois arriver aux Féroé...quel naïveté!

Mais ça y est, j'y suis.
Et le soleil est là aussi.

Alors que je me prends un café dans le bar du coin, voilà que je vois débarquer Christelle à qui je vais confier mes problèmes mécanique et mon angoisse. Je vous avoue que je ne me rappelle plus trop de quoi nous avons parlé ensuite...
De toute façon, quelques instants plus tard nous voilà séparé. Elle ira sur la file des gens rentrant directement sur le continent, moi j'irai sur celle des voyageurs faisant halte aux Iles Féroé.

Alors que je patiente tranquillement, un homme chauve comme moi vient m'aborder, me demandant si je suis bien le connar...heu, le motard bionique. Teudiou, c'est pas la classe ça??

En effet, il avait pu voir ma tronche dans un article sur Roadtrip Magazine , merci à eux!!

Va alors commencer une longue discussion sur la moto, les voyages, le handicap, sujet qu'il ne connaît que trop bien de manière indirecte. Une belle rencontre, sans chichis, à cœur ouvert. Il me semble qu'il s'appelle Dominique, mais hélas j'ai perdu ses contacts...alors si quelqu'un ici le reconnait, merci de me mettre un mot sur FB, ou en commentaire ci-dessous!!

Merci pour ce moment :)

Commence alors le rituel de l'embarquement. On monte dans le Ferry, on dépose le matériel, on sangle les motos, on prend notre paquetage sous le bras et on part à la recherche de sa petite cabine.

Une fois fait, me voilà sur le pont...enfin au bar, où je vais croiser mes italiens préférés, vu à l'aller et croisés furtivement il y a quelques jours à peine. Nous sommes entre motard(e)s, et racontons nos voyages respectifs. Ils ont tous fait la boucle par la route uniquement (ou presque) alors quand je pars dans mon récit, tout heureux de m'être enlisé, d'avoir pété ma fourche, d'avoir frôlé la mort à cause du vent, d'avoir fait un aller-retour dans le centre juste pour une photo ou encore d'avoir noyé ma moto, les gens présents vont juste me regarder genre...


Je vais ensuite m'éclipser pour aller faire une sieste. Il est 15 ou 16h, et nous débarquons à 3 heures du matin. Il vaut mieux dormir un peu...surtout que j'aimerais beaucoup rouler de nuit.

Heu...

Je suis en train d'oublier que:
1) Je n'ai plus de feu de croisement
2) J'ai un problème de pression d'huile

Bref, pour le roulage de nuit on repassera...

Avant le débarquement je vais recroiser Christelle avec qui nous allons regarder quelques photos, et échanger vidéos et souvenirs. C'est la dernière fois que je l'ai vu, mais j'espère bien avoir l'occasion d'aller boire un coup avec elle dans son pays de consang...heu...dans cette jolie région du Nord! *je sens que je vais me faire démonter*

Il est maintenant temps de débarquer.

Je mets juste le contact sur ma moto...le tableau de bord est couvert de buée, l'écran LCD n'affiche quasiment plus d'informations, les voyants ne s'allument plus - alors qu'ils devraient - et quand je démarre, seul le voyant de pression d'huile se rallume - alors qu'il ne devrait pas. Bref, c'est en train de partir en cacahuète...

Et je reste poli.

Il fait vraiment nuit - une première depuis 15 jours -, je n'y vois rien avec ma loupiote de feu de croisement seule, il pleut, mais heureusement le camping n'est qu'à deux petits kilomètres. Le montage de la tente se fera vite - il faut dire que je commence à avoir l'habitude, et le sommeil ne se fera pas attendre.

Le lendemain, je vais pouvoir découvrir le cadre bucolique du camping, et en profiter pour faire un autoportrait...

Le gland entre les pattes de notre écureuil favori, c'est moi.

Mais malgré le soleil, c'est bien ma sombre histoire de mécanique qui va m'occuper toute la journée.

Je demande au gérant du camping s'il ne connait pas un garage pas loin...ce charmant Monsieur, de prime abord pas franchement aimable, passera une bonne demi-heure au téléphone à se renseigner pour savoir si quelqu'un peut m'aider. Comme quoi, il ne faut jamais trop se fier à une première impression! Ceci dit, l'échec sera total.

Puis, en contact avec un de mes mécanos - Thomas, si tu me lis... -, je vais passer la journée à essayer de savoir si oui ou non je peux continuer à rouler.
En plus d'être scotché à internet pour essayer de glaner toutes les informations possible, je vais aussi tenter de faire de la mécanique...de la mécanique façon LMB, c'est à dire comme un gland et n'importe comment.

Je ne sais plus trop le pourquoi du comment...mais il y avait une raison valable à cette situation. Surement.
Puis finalement, après diverses tergiversations, et après avoir abandonné tout espoir de solutionner le problème, je vais me rendre à l'évidence. De toute façon tout mon tableau de bord ne fonctionne plus...plus rien ne s'allume, ne s'éteint ou s'affiche quand il le devrait.

Un tableau de bord qui baigne dans l'eau, des indicateurs au comportement des plus incohérent, ma vitesse et ma jauge d'essence qui disparaissent...Alors pourquoi faire confiance à ce voyant de pression d'huile? Pourquoi s'inquiéter alors que j'ai juste noyé mon moteur dans une rivière deux jours avant? On se le demande!

De l'huile, il y en a ce qu'il faut, et il est probable que la surpression due au trop plein avec lequel j'ai roulé pendant quelques kilomètres ai tout simplement péter le capteur. Alors je décide que j'irai rouler dès le lendemain.

Et advienne que pourra!

J'enfourche donc la moto et file au centre commercial juste à côté pour avoir de quoi prendre l'apéro...C'est important, ça, prendre l'apéro.

De la vraie bière! Hi Ha!

C'est même le principal quand on se dit qu'on ne va peut-être pas pouvoir finir son roadtrip parce que son moteur va exploser à 140km/h sur l'autoroute du retour...je suis peut-être dans le déni, mais ce genre d'idée commence à fuser dans mon esprit!

A ce stade là de la journée, il faut bien le dire, je suis un peu morose...je viens (encore) de perdre une journée pour un problème mécanique, et l'état de la moto m'inquiète. En plus la fin de ce voyage commence à ressembler à un pétard mouillé. C'est là qu'une petite chose toute simple va venir m'apporter un bonheur qui le fut tout autant...

Le soleil se couche, et tout va devenir rougeoyant...ce n'était pas un simple couché de soleil, je n'ai pas le souvenir d'avoir vu une lumière aussi étrange dans ma vie. J'ai connu des couchés de soleil plus beaux, mais ce jour-là, cette lumière fut vraiment spéciale.

Alors je vais me poser face à l'océan avec mes bières, une clope, de la musique et les souvenirs d'un rêve accompli. Le reste? Je verrais bien demain.

Je m'en fous de toute façon.

J'ai fais le Tour d'Islande.







A suivre...












8 commentaires:

  1. Super encore une fois. Je comprends mieux ce que tu me disais dans ton mail quand tu parlais de problèmes sur la moto !!
    Classe de la punk IPA au Féroé je ne pensais pas qu'on en trouverait la bas.
    Avec tes photos je regrette presque de ne pas m'arrêter aux iles ... Mais bon maintenant c'est trop tard :D

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  2. Tu es vraiment un grand MALADE!!

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  3. Toujours aussi bien écrit enfoiré. Quand même, me dis pas que tu as couché ta moto dans l'espoir de vider le trop plein d'huile par le bouchon de remplissage ? Parce que le pire, c'est que je t'en crois capable... ;-)

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    1. C'est vrai, j'aurais pu.

      Mais là c'était pour une histoire de démontage du capteur de pression d'huile, un truc comme ça

      ;)

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  4. Bravo pour ce récit toujours aussi palpitant... et les photos du coucher de soleil ! mmmmhhhhh
    Alors et cette bkne ?

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    1. Ca fait 4 mois qu'elle ne peut plus rouler...en attente de réparations (et pas des moindres...)

      :(

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  5. pfff ! je viens de me rendre compte que tu as participer a l'inauguration d'un magasin Touratech a deux pas de mon taf, j'en aurais profiter pour te féliciter pour ton sacré courage !!

    Bruno

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